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Jazz Magazine N° 11

Jazz Magazine

Jazz Magazine - novembre 1955

Editor
Date novembre 1955
Format Magazine
Pages 40 pages
Location France
Language French
Chapters

Edito

Le nom du grand Louis Armstrong est synonime de jazz pour nous tous. cet homme, cet artiste de génie, représente, pour l’amateur de cette musique comme pour le grand public, tout cet art musical neuf qui vit le jour au début du siècle et qui se développa depuis avec tant d’intensité. La venue en Europe, en 1955, du prestigieux trompette, doit nous rappeler que ce même homme jouait, il y a maintenant plus de trente ans, aux côtés de ceux qui les premiers créèrent l’art négro-américain, et cette constatation doit nous remplir de confiance dans cet art et écarter de nos pensées l’esprit de dénigrement qui cause tant de tort à la musique que nous aimons.
Comment est-il possible de considérer comme du passé la musique de la Nouvelle-Orleans alors que le second trompette de King Oliver est toujours en grande forme et improvise avec plus de verve que jamais ? Comment peut-on réduire le jazz à quelques essais de jeunes gens doués de la Côte Ouest alors que les Maîtres qui présidèrent à sa naissance n’ont pas fini de créer et de nous prodiguer des œuvres magnifiques et fécondes ?
Il faut réagir contre cette tendance qui consiste à faire la moue devant la majorité des œuvres de jazz dans l’attente de « chefs d’œuvre » qui, selon certains, n’apparaissent que tous les dix ans. Laissons donc à nos petits-fils, musicologues de l’an 2000, le soin de dresser ce catalogue des grandes pièces des premières années du jazz ! Et n’ayez aucun scrupule, aucune fausse honte à prendre du plaisir à ce qui est joué et créé actuellement, comme à l’audition de tous les disques des trente premières années du jazz. Vous assistez actuellement à un phénomène unique dans l’histoire de la musique : l’épanouissement d’un art neuf, le jazz. Jouez donc pleinement le jeu et ne suivez pas ceux qui se découvrent du génie dans la seule destruction et dans une « critique » aigrie.
Louis Armstrong, Count Basie, Lionel Hampton, Art Tatum, Duke Ellington, Dizzy Gillespie, Teddy Wilson..., la liste est longue des « grands » qui vous prodiguent du bon jazz. Cette musique est faite pour vous. Vous devez être leur meilleur public, celui qui aide le musicien ; vous devez encourager le jazz de toutes vos forces et la venue de Satchmo doit être pour vous la plus belle occasion de libérer votre enthousiasme.
J. M.

SOMMAIRE

  • p 5 : TÉLÉGRAMMES.
  • p 8 : FLASHES DE FRANCE
    • D’ALLEMAGNE par Klaus Berenbrok
    • DE BELGIQUE, par Yetty Lee.
    • D’ANGLETERRE, par Jack Hutton
    • D’AMÉRIQUE, par Leonard Feather D’AMÉRIQUE, par Felix Manskleid.
  • p 12 : LE PETIT DICTIONNAIRE DU JAZZ, les guitaristes
  • p 17 : MILES DAVIS
  • p 18 : LA PETITE HISTOIRE DU JAZZ (XI) : En Europe : La guerre, Aux Etats-Unis : Apogée du « Middle-Jazz »
  • p 19 : LES TROIS VIES DE LOUIS AMSTRONG par Leonard Feather
  • p 27 : JAZZ A L’HOLLYWOOD BOWL
  • p 31 : LES DISQUES
  • p 37 : LA RADIO, par Jacques Gourdon
  • p 38 : QUESTIONS ET RÉPONSES.
Notes

Flashes de Belgique par Yetty Lee
Désireux de confronter en toute liberté d’expression les opinions des principaux critiques belges sur la musique jazz, le Hot Club de Belgique organise le mercredi 14 décembre prochain à 20 h 30 au Palais des Beaux-Arts, une réunion publique d’information.

Chaque critique disposera d’un certain laps de temps pour étayer ses points de vue. Maitre Robert Goffin a accepté de présider la séance et de conduire les débats auxquels le public sera invité à participer.

Voilà une intéressante réunion à ne pas manquer, Avec un peu de chance il y aura de palpitants « mouvements divers »

CHET BAKER et son trio se sont gentiment comportés au concert de Bruxelles. BAKER, en très belle forme, a expliqué des choses charmantes et, mon Dieu, pleines de swing. Sans doute à cause de notre été qui ne veut pas abdiquer, il y a eu des moments très « hot ». Bien meilleur qu’en disque le Chet ! Son pianiste possède une forte formation classique et a voulu nous le démontrer. BRUBECK a dû passer par là. Le bassiste tire ses quatre temps en souplesse, bien secondé par un drummer qui connait la définition du swing. BAKER a chanté aussi et je dois avouer que cela m’a plu. Il est possible que l’instinct maternel y soit pour quelque chose. Bref, le concert a remporté un vif succès devant une salle comble et enthousiaste. En Belgique aussi, on note une nette hausse des actions « Jazz Moderne ».

Au Lido du Palace où travaillent les orchestres de Janot MORALES - une grande formation équipée pour jouer le meilleur jazz avec des arrangements modernes mais qui doit se plier aux exigences de la clientèle et de Vicky DOWN - ensemble typique de qualité - on peut entendre aussi le pianiste chanteur canadien Milt SEALY. Camarade de classe de PETERSON et FERGUSON, SEALY a travaillé à New-York avec Dizzy GILLESPIE, Percy HEATH et Kenny CLARKE. II vint en Europe pour compléter des études musicales commencées aux U.S.A. Il a enregistré des boogies pour une marque belge, accompagné par l’ensemble de Charlie KNEGTEL. Quoiqu’il ait enregistré dans le vieux style à Paris, ses préférences vont naturellement au jazz moderne.

Au cours de la séance commémorant le dixième anniversaire des émissions « Regards sur le jazz », Carlos de RADZITZKY le plus éclectique et aussi le plus compétent de nos critiques et commentateurs de jazz -nous a fait entendre les différents indicatifs utilisés pour les séances. Dix années de bon travail et d’intelligente propagande indépendante et constructive. Bravo !...

Jean « TOOTS » THIELEMANS a remporté avec les disques dont je vous avais parlé il y a quelques mois une cote de choc dans la critique du « Down Beat » : four stars. (Album LP « The Sound » Col. CL 658).

Par ailleurs, en écoutant l’émission quotidienne et excellente de TENOT et FILIPACCHI à Europe nº 1, j’ai appris qu’un récent enregistrement de SADI avait également recueilli la cote maximum dans la critique de « Metronome ». Nous sommes très forts, dirait Pol CLARK. Plaisanterie dans le coin, ça nous fait mal de constater que tous nos grands bonshommes ont dû s’expatrier pour concrétiser leur talent. Merci aux critiques américains - et surtout au public français qui porte nos as sur le pavoi - pour la cuisante leçon qu’ils donnent à la presse et au public belges. Tous ces brillants musiciens menacent sérieusement un vieux dicton bien de chez nous : « Tout ce qui est « Belche » est mauvais ».

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